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vendredi 18 mai 2012

Feed, ou comment nourrir son esprit critique...


Rédaction d’un compte-rendu critique :
ANDERSON, Interface.
Feed, ou comment nourrir son esprit critique.

« Interface » est un roman détonnant mêlant les genres du roman de formation à la dystopie. L’auteur plonge qui veut le lire dans un monde futuriste aux mœurs pas si étrangères aux nôtres, tout en multipliant les références aux grands classiques de littérature de science-fiction, tels que Huxley, Orwell ou encore Wells. Malgré un style un peu lent, le rendu final est plus qu’appréciable, et il l’est d’autant plus en  considérant la visée pédagogique du roman de formation qu’est ce livre…

Matthew Tobin Anderson est un écrivain américain, originaire de Boston. Après de longue étude en littérature à Harvard ou encore à Cambridge, l’auteur se laisse happer par la musique, ainsi devient-il disc-jockey, ou encore critique musical avant de revenir vers son domaine de prédilection qu’est la littérature. Il devient assistant éditorial dans l’édition pour la jeunesse avant de finalement se laisser, lui-même, tenter par l’écriture. Interface qui est la traduction française du titre originale Feed lui vaut un grand succès avec lequel il remporta notamment deux prix. Anderson, après avoir travaillé dans l’édition, sait ce qui plait, c’est pourquoi il a choisi la science-fiction et plus précisément, la dystopie pour son roman, sous-genre qui place le lecteur face à un futur possible que dénonce l’auteur. Ainsi, dans ce livre, le lecteur est confronté à une société de consommation poussée à l’outrance, incapable de penser par elle-même (Une puce électronique implantée dans le cerveau s’en charge pour eux), une société capitaliste qui plus est, et vivant dans un monde en déchéance où le niveau de CO² est maintenu uniquement grâce à des usines construites à cet effet. Une planète en perdition à partir de laquelle l’auteur entend bien mettre en garde ses jeunes lecteurs.

Concernant l’objet « livre », ce roman pour adolescent fût édité chez « Gallimard jeunesse » dans la collection « Scripto », en 2004 pour la traduction française. Cette collection est bien connue pour prendre sous son aile des textes qui « dérangent », ou en tout cas dont le dessein est d’éveiller les esprits du « troupeau aveugle ». Rendre l’esprit critique de ses jeunes lecteurs aiguisé, voici à quoi s’engage Scripto. Interface n’est, de ce fait, pas un livre à prendre au premier degré ou à ne lire rien que pour le plaisir, et si tel est le cas, le lecteur est réellement passé à côté de la visée pédagogique du roman de formation, qui est de pousser ses jeunes lecteurs à prendre du recul par rapport à l’histoire à proprement parler pour adopter un raisonnement mature.

L’œuvre de M. T. Anderson, Interface, c’est avant tout, la vie trépidante d’un jeune adolescent, Titus. Ce dernier, lors d’un voyage sur la Lune avec ses amis, va faire une curieuse rencontre, celle de Violet, une jeune fille dont les idées dérangent. Cette adolescente est en effet à part des autres en ce sens qu’elle est libre de penser par elle-même. Elle porte un regard sévère sur le monde qui l’entoure à propos de sujet divers tels que la suprématie des nouvelles technologies, la pollution dans le monde, le devoir de mémoire,…

Cette différence la mènera, hélas, à sa perte, dans un monde où le conformisme est la seule liberté laissée au peuple. Quant à Titus, il commencera son long et laborieux périple qui le mènera, un jour, à une possible prise de conscience. C’est donc autour d’une romance entre deux jeunes adolescents dans un monde futuriste que l’auteur a choisi d’écrire sa trame narratologique.

Les deux jeunes protagonistes de l’histoire sont donc Titus et Violet, deux jeunes ados à priori que tout rapproche mais si différents. Titus, représente le conformisme, ce qu’est le « bien penser », il est comme 73pourcents des jeunes américains pourvu d’une interface dont il ne saurait se passer. Le choix de rendre le personnage assez froid et dur avec Violet ne favorise pas l’identification par le jeune lecteur, ce qui peut, par contre, l’encourager à s’identifier à Violet. Cette dernière est présentée comme victime de la société, issue d’un milieu peu favorisé, elle n’acquiert son interface qu’à l’âge de 7 ans, le triste hasard fera malheureusement que quelques années plus tard, elle sera la proie d’un pirate. Toutefois, la réparation de son interface se serait faite sans problème si elle n’avait pas été un « mauvais profil » de consommatrice. Elle représente la rébellion, le « bon agir », elle lutte quand d’autres aurait baissé les bras, elle est l’exemple à suivre. Choix judicieux de l’auteur qui est de favoriser l’identification à ce personnage en la rendant « martyre », puisque qu’elle est la personnification de l’esprit critique et du « juste penser ».

Ce roman d’Anderson se présente comme un pamphlet dénonçant les dérives de l’époque actuelle. En critiquant une société dans laquelle il faut suivre la mode à tout prix au risque de porter préjudice à soi-même, où les mots d’ordre sont la technologie encore et toujours¹, une planète sur laquelle l’air devient irrespirable et où il n’est plus possible d’avoir un enfant naturellement à cause de la surexposition aux radiations, un monde dans lequel le fossé entre riches et pauvres se creusent davantage chaque jour, et où la devise tend à devenir : « Marche ou crève » (Violet en est d’ailleurs l’exemple « type »), l’auteur incite le lecteur à réfléchir. De plus, pour étayer ce qu’il dénonce, l’auteur prend appui sur d’autres œuvres et d’autres écrivains qui, comme lui, se sont souciés de demain. Ainsi pour ceux qui l’ont lu, Le meilleur des mondes, d’Aldous Huxley grâce aux nombreux conceptianarium, ou encore par ce besoin d’être constamment dans un état second grâce au soma pour Huxley, grâce aux bogues pour Anderson. D’autres liens sont à faire avec le roman de Bradbury, Fahrenheit 451, à cause de cette omniprésence des écrans télé qui captivent l’attention des gens au point de leur faire oublier la réalité dans Fahrenheit 451, et à cause de l’interface qui remplace véritablement les liens interhumains et qui en vient à les faire oublier dans Interface. Ainsi, la plupart des discussions qu’entretiennent Titus et Violet se font-elles par interface. Le troupeau aveugle de Brunner également avec qui l’auteur entretient le souci de la nature. Ou bien encore, dans 1984, d’Orwell, qui dénonce une société de contrôle selon le Big Brother (Is watching you), semblable à celle que dénonce Anderson. Dans 1984, également, l’auteur met en avant un appauvrissement de la langue conduisant lui-même à une restriction des limites de la pensée…

« Ne voyez-vous pas que le véritable but du novlangue est de restreindre les limites de la pensée ? »²

Et même si Anderson ne le revendique pas explicitement, il décrit un monde où aller à l’école n’est plus une obligation, et quand bien même on s’évertue à y aller, c’est pour suivre des cours sur l’utilisation de l’interface. Le père de Violet, ancien universitaire est décrié par tout qui l’approche et notamment Titus :

« -Je n’ai pas compris un seul mot de ce qu’il a dit.

-Il prétend que le langage est en train de mourir. »³

Dès lors, les deux auteurs se rejoignent. À la page 268 du roman, le père de Violet dit à Titus :

« (…) Va t’amuser parmi les Eloïs. » p.268.

Faisant donc explicitement référence au roman de Wells, La machine à explorer le temps, en injuriant le jeune garçon d’ignare.

Anderson, dans son livre met tout en œuvre pour pousser son lecteur à la réflexion de par le choix du genre apprécié chez les jeunes adultes (dystopie), mais également grâce au genre de roman de formation, et ensuite par la judicieuse description de Violet qui pousse le lecteur à l’identification. Tout y est rassemblé afin qu’Interface ait une réelle portée philosophique et morale chez les jeunes qui le liront.

Toutefois, parce qu’une œuvre n’est jamais irréprochable, un adolescent de 15 ans ne comprendra peut-être pas toute la subtilité des hommages que rend l’auteur aux grands écrivains, ce qui est regrettable…

Malgré tout, l’auteur d’Interface arrive, par le biais de son roman à la visée pédagogique fixée par le roman de formation.

¹ Impossible de lire ce livre sans penser à la nouvelle création de Google : projet glass
² Extrait in: ORWELL (G.), 1984, éd. Folio, pp. 74.
³ Extrait in: ANDERSON (M.T.), Interface, éd. Gallimard jeunesse, “coll. Scripto”, p.132.

Roman que j'aimerais re-lire.

A l'aube des examens, mais aussi bientôt, des vacances, je réfléchis à la liste de livre que j'aimerais lire ou re-lire... Je me souviens de ce roman que j'ai du lire en cinquième secondaire de Thierry Jonquet, La bête et la belle, un formidable roman policier, et un incroyable roman à chute qui plus est.
Ah ce bon vieux "Léon" m'aura laissé un souvenir impérissable... Qui est Léon? Je ne vous le dit pas! Ou alors juste un indice...                  Il est la clé de tout....

Bref si vous voulez, vous aussi, lire une thiller haletant, avec une fin triste, mais oh combien surprenante.... Je vous le conseille!

jeudi 17 mai 2012

RAUCY Claude, Le doigt tendu

Je m'attèle à un compte-rendu critique de l'oeuvre de Claude Raucy un peu tard peut-être, mais le fait d'avoir rencontré le "personnage" me donne de l'inspiration...

1) LA rencontre...
Tout d'abord, je tiens à adresser toute ma sympathie à Monsieur Raucy qui a su garder toute sa simplicite malgré sa notoriété, je garderai en mémoire de cette rencontre un homme jovial, ouvert à l'auto-dérision, et qui ne se laisse pas désarçonner quand bien même on le "taquine". Connaître cet homme et avoir l'occasion de lui poser des questions en toute simplicité comme il a été question durant l'après-midi du jeudi, m'a réellement donné l'envie de lire d'autres romans de Monsieur Claude...
Ce n'est pas une personne présomptueuse, et j'aurai tendance à dire que j'apprécie d'autant plus ses oeuvres maintenant que je "connais" l'Homme qui se cache derrière.

2) Le doigt tendu...
Je fus fort étonnée de voir cette oeuvre tant critiquée lors de la rencontre, je regrette d'ailleurs de n'avoir pas osé prendre part au débat, mais je ne tenais pas à ce que les choses prennent des allures de "règlements de compte" entre les fle et les moralistes.
Toutefois, j'ai été agréablement surprise par cette lecture, j'étais, je dois l'avouer, un peu réticente à l'annonce du titre et du thème, et j'avoue m'être dit:

"Oh non! pas encore, la guerre, j'en ai mangé des visites et des livres à ce sujet!!
On va encore nous parler des camps, oui je sais, c'est malheureux, on ne doit pas l'oublier mais on nous rabroue tellement les oreilles avec ça que j'en ai marre!!"


Puis, en rentrant chez moi, je me suis mise à lire et là, les pages déferlèrent, j'ai terminé le roman en un jour. Ce que j'ai le plus aimé dans l'écriture de Monsieur Raucy, c'est cette façon qu'il avait de peindre la guerre d'une jolie façon, pas de camp, pas d'extermination, il était question de la VIE pendant la guerre. Pourquoi cette approche positive de la guerre, Claude nous apporta sa réponse à lui, pendant la guerre, il eut une enfance heureuse. Dès lors, je comprends mieux son choix d'approche.

Ensuite, j'avoue avoir beaucou réfléchi à la fin, cette délation tant attendue qui ne vint finalement pas... Cela m'a réellement laissé perplexe, dans le cadre de la formation de moraliste que nous suivons, je me suis retrouvée face à un dilemme moral auquel je ne trouvais pas de réponse satisfaisante...
Jacque doit-il payer pour sa faute? Je dois admettre n'avoir toujours pas trouvé de réponse qui me satisfait entièrement. Ce n'est pourtant pas faute d'y avoir réfléchi!
En conclusion, je pense donner ce livre à mes futurs élèves aussi bien en français qu'en morale. En français, pour le côté "positif"que Monsieur Raucy apporte à la guerre, c'est une tout autre façon d'approcher l'atroce, ça dépayse, mais ça fait du bien! Et en morale pour le dilemme que ce roman pose, et peut-être que les élèves auront, eux, une réponse à m'apporter...